Le cinéma valenciennois à l'honneur dans un article
L'édition valenciennoise de La Voix du Nord du 29 juillet met à l'honneur le cinéma Eden de Valenciennes. Voici ci-dessous l'intégralité de l'article...
Après la Première Guerre mondiale, un cirque existait rue Saint-Jean, près du presbytère de l’église Saint-Géry. Appartenant à la famille Pourtier, il fut racheté en 1936/37 par la famille Berna qui le transforma en un cinéma que l’on baptisa Eden. Mais le premier bâtiment devait être victime de l’incendie de 1940 qui détruisit entièrement le local. Et, avec lui, une bonne part du centre-ville. Après quatre longues années d’occupation, la vie reprit peu à peu. La famille Berna entreprend alors, en 1947, la construction d’un nouveau cinéma « provisoire », sur un emplacement de la rue de Lille, à hauteur de ce que l’on appelait la place du Théâtre. L’actuelle zone Match en fait, aujourd’hui en travaux. Bien que définie comme construction provisoire, la salle offrait de bonnes conditions techniques avec une projection pratiquement horizontale sans plongée. Cela, du fait de l’absence de balcon sur place.
La magie du cinéma, à quoi tient-elle ? Visiblement, pour les mômes de l’époque, les glaces de l’Eden, les fameux « gelcos », ont laissé des souvenirs au moins aussi profondément marqués que les plus belles toiles du septième art. Mais il y a aussi d’autres souvenirs, de purs cinéphiles.
Monsieur Berna gérait son cinéma avec un soin tout particulier. Ce qui lui valut son vrai bâton de maréchal ; la remise, en 1950, du premier prix du concours Cendrillon à l’occasion de la sortie du dessin animé homonyme des studios Walt Disney pour les fêtes de Noël. François Carrin, cinéphile averti, s’en souvient comme si c’était hier. « J’étais âgé de cinq ans et je me rappelle parfaitement cette séance. Même du documentaire qui accompagnait le film. La Vallée des Castors (Beaver Valley), le second titre de la série True-Life Adventures, un court-métrage qui a d’ailleurs reçu un Oscar. »
L’Eden, ce n’était pas que le grand film du soir, mais aussi la première partie. « C’est dans ce cinéma que moi aussi j’ai vu les premières pubs de Jean Mineur. Et mes premières actualités, signées Éclair-Journal », ajoute F. Carrin.
L’exploitation du cinéma Eden a pris fin au début des années 1970. Le provisoire devait pourtant s’installer de façon plus pérenne. Il était en effet prévu de financer une installation définitive avec les « dommages de guerre », à l’angle de la rue de la Vieille-Poissonnerie et de la rue des Récollets. Là donc où s’installera, en 1985, le cinéma Les Arcades, disparu lui aussi et dont le local a été repris par le magasin Tati, au sortir de la rénovation du centre-ville et de l’arrivée du tram.
À l’époque, pour l’Eden, seul le gros œuvre avait été réalisé ; mais le dossier ne trouva pas d’aboutissement, et ce pour des problèmes familiaux d’ordre privé.
Gérard Berna (1925-2003) quittera au final le monde du cinéma pour s’employer au profit du bureau Véritas. De son cinéma, il a été jusqu’ici impossible de trouver des photos si ce n’est cette vue aérienne sur laquelle on peut l’apercevoir. La seule trace à ce jour.
«La plus belle œuvre d’art de la ville»
Jacques-Hubert Mabille de Poncheville, ancien journaliste à La Voix du Nord (et chef d’édition à Étaples), est issu d’une vieille famille valenciennoise illustre. Il se souvient parfaitement des séances de l’Eden. Mieux, elles ont même profondément marqué son enfance. Avec des souvenirs qu’Eddy Mitchell n’aurait pas reniés pour son émission culte, La dernière séance.
« Elles commençaient par un premier film de 10 à 12 minutes sur n’importe quel sujet : documentaire géographique, animalier. Ou encore Serge Gainsbourg déguisé en poinçonneur à la station Lilas et chantant sa chanson pleine de petits trous. Puis il y avait quelques minutes d’actualités (de moins en moins au fil des ans), enfin la présentation du film à venir, puis la pub. Et déjà Jean Mineur, dont on ignorait alors qu’il était originaire de Valenciennes.
Après la réclame, les lumières se rallumaient quelques instants. Une dame bien en chair passait dans les rangées avec un panier suspendu à son cou : bonbons La pie qui chante et «gelcos», ces fameuses glaces qu’on appellerait «skis» plus tard.
De nouveau l’obscurité, la délicieuse sensation de s’enfoncer dans le moelleux du velours rouge du fauteuil et le «grand film» commençait… Il n’y avait pas de balcon mais la salle de l’Eden s’incurvait joliment pour remonter légèrement quand on s’approchait de l’écran.
Au-dessus de l’entrée, sur un panneau de bois trois fois plus large que haut, un artiste peignait chaque semaine la scène du film hebdomadaire la plus susceptible de donner envie d’entrer. C’était pour moi la plus belle œuvre d’art de la ville. »
L'article en version La Voix : http://www.lavoixdunord.fr/198377/article/2017-07-29/qui-se-souvient-des-seances-du-cinema-eden
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