"Quand la mer monte", l'anti "Bienvenue chez les ch'tis" ?

Et si le film montrant le plus beau visage de la région Nord-Pas-de-Calais de ces 20 dernières années, celui qui doit effacer l'image négative de "La vie est un long fleuve tranquille" avec ces personnages caricaturaux "affreux, sales et méchants", celui qui doit rendre sa fierté à une région, souvent en manque de reconnaissance médiatique, n'était pas "Bienvenue chez les ch'tis" et son image faussement bonhomme des gens du Nord, mais pluôt "Quand la mer monte" de Gilles Porte et Yolande Moreau, sorti en 2004 ?
L'histoire ? une comédienne en tournée pour un one woman show improbable est de passage dans le Nord de la France. Lentement, elle tombe amoureuse d'un porteur de géant de carnaval rencontré lors d'un spectacle. 
Le film montre de très nombreux paysages ainsi que des moments forts typiques de la région. Bien sur, on n'évite pas les clichés : le carnaval, la bonhommie des gens du Nord "qui ont le coeur sur la main", les bistrots et cafés, mais aussi des portraits de "déglingués de la vie" qui, sous leur apparence joviale, sont les témoins de la France fin de siècle (le personnage principal masculin interprété par l'acteur belge Wim Willaert dans le rôle de Dries, le porteur de géant)... Différentes scènes montrent des paysages du Nord. Ainsi, le film commence sur une des très nombreuses autoroutes de la région (avec l'Ile de France, le Nord-Pas-de-Calais est la région qui compte le plus d'autoroutes). On aperçoit également différentes scènes de théâtres du Nord, notamment le théâtre de Béthune où a été réalisé de nombreuses séquences du spectacle. La caméra tourne autour du personnage d'Irène (Yolande Moreau dans le film) lors de son spectacle qui évoque l'assassinat d'un mari par son épouse... La beauté des plages du Nord fait écho à une autre scène du film tournée dans la zone industrialo-portuaire de Dunkerque. Faisant dresser le poil de la fibre régionaliste, l'apparition des géants ne laisse pas insensible l'amoureux du Nord. On aperçoit ainsi le géant de Steenwerck, Totor. Une des dernières scènes de cette oeuvre montre le quartier de Euralille et de ses tours, un Nord moderne. Enfin, le plus beau plan du film, qui en résume notamment l'idée est cette image d'une route flamande bordée d'arbres inclinés par le vent avec une lumière magnifique.
Portrait poétique et sensible du Nord-Pas-de-Calais, le temps rendra certainement toute son importance à cette oeuvre touchante sur deux paumés de la vie qui se cherchent et se trouvent, une reflexion sur le théâtre, et la représentation de la vie, que ce soit sur scène ou en portant un géant, un film sur l'amour et l'absence (Irène téléphone souvent à son mari, absent du film alors que ce nouent les sentiments entre la comédienne et Dries). La région est donc admirablement évoquée, montrant les communautés, l'ennivrement par la fête, les particularismes, sans tomber dans les clichés...

Une scène clé dans tous films tournés dans le Nord qui se respectent : la visite à l'estaminet... que ce soit dans Bienvenue chez les ch'tis ou dans Quand la mer monte
A noter que suite au film, le personnage interprété par Yolande Moreau devient un géant nommé Irène que l'on rencontre régulièrement lors des sorties de géants et carnavals. 
Cette comédie sociale et sentimentale a rencontré un tout petit succès publique avec un peu plus de 370 000 entrées et a remporté un beau palmarès avec, excusez du peu, le prix Louis Delluc du meilleur premier film, le César 2005 du meilleur premier film et le César de la meilleure actrice pour Yolande Moreau.

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